Comprendre ce qu’est un fonds de commerce
Acheter un fonds de commerce peut être une formidable porte d’entrée dans le monde de l’entrepreneuriat. Mais encore faut-il comprendre ce qu’on achète réellement. Non, ce n’est pas juste “le magasin” ou “le bar au coin de la rue”. En réalité, un fonds de commerce, c’est un ensemble d’éléments qui permettent l’exploitation d’une activité commerciale. Et ces éléments ne se limitent pas aux murs ou aux produits en stock.
Le fonds de commerce comprend généralement :
- La clientèle et l’achalandage
- Le droit au bail (le droit d’occuper un local commercial)
- Le nom commercial et éventuellement l’enseigne
- Le matériel et les équipements
- Les licences ou autorisations spécifiques (ex : licence IV pour un bar)
À noter : les murs, c’est-à-dire le local proprement dit, ne font pas partie du fonds de commerce sauf s’ils sont expressément inclus dans la vente. Il faut également bien distinguer le fonds de commerce du stock de marchandises, qui est souvent négocié à part.
Pourquoi acheter un fonds de commerce plutôt que créer sa propre structure ?
À première vue, créer son entreprise de A à Z semble plus séduisant : plus de liberté, pleine maîtrise du projet… Pourtant, dans bien des cas, l’acquisition d’un fonds de commerce existant peut représenter un gain de temps et de rentabilité non négligeable.
Voici quelques avantages concrets :
- Un modèle d’affaires déjà testé
- Une clientèle existante
- Des fournisseurs en place
- Un emplacement stratégique validé par la réalité terrain
- Un historique comptable consultable
C’est un peu comme acheter une voiture d’occasion avec un contrôle technique positif et une garantie, plutôt que de construire soi-même le moteur. Ce n’est peut-être pas “votre idée de départ”, mais c’est souvent plus sûr.
Quels types de commerce sont intéressants à acheter ?
Avant d’acheter, posez-vous la question : quelle est la valeur réelle du commerce… et quelle est sa valeur potentielle ? Un commerce vieillissant dans un quartier en mutation peut révéler un fort potentiel de croissance, là où une boulangerie flambant neuve en zone rurale peu peuplée pourrait s’essouffler rapidement.
Quelques secteurs attractifs en 2024 :
- Les commerces alimentaires de proximité (boulangeries, boucheries, primeurs)
- Les services à la personne (salons de coiffure, instituts de beauté)
- Les bars, cafés et restaurants bien situés
- Les commerces à forte valeur touristique
- Les espaces de coworking ou concepts hybrides dans les grandes villes
Pensez aussi à la compatibilité entre votre profil entrepreneurial et le type de commerce. Avoir 10 ans d’expérience en restauration ne garantit pas que vous aimerez gérer une salle de sport… même rentable.
Comment évaluer un fonds de commerce : grille d’analyse pratique
Acheter sans évaluer est une erreur de débutant. Une analyse rigoureuse s’impose pour ne pas se retrouver avec un commerce sous-performant ou invendable. Voici les principaux leviers à scruter :
L’analyse financière
Demandez au cédant les bilans des 3 dernières années. Portez une attention particulière à :
- Le chiffre d’affaires (stable, en croissance, en déclin ?)
- Le résultat net
- La marge brute
- La part de la masse salariale
- Les dettes éventuelles attachées à l’activité
Un commerce qui affiche une belle rentabilité, c’est un bon point. Mais attention : la rentabilité seule ne suffit pas si la clientèle s’effrite. D’où l’importance du deuxième pilier.
La clientèle et l’environnement
Le fonds est-il situé dans une rue passante ou dans une zone en perte de dynamisme ? Le local est-il visible depuis la rue ? Quelle est la typologie de la clientèle actuelle ? Est-elle fidèle ? Consommation régulière ou occasionnelle ?
Une rapide étude de terrain peut faire toute la différence. Allez sur place à différents moments de la journée. Discutez avec les voisins commerçants. Observez l’affluence naturelle du lieu. Rien de tel que le terrain pour compléter les dossiers papiers !
Le bail commercial
Un bail commercial bien négocié est un atout stratégique. Vérifiez :
- Le montant du loyer (par rapport aux prix du marché local)
- La durée restante (généralement un bail 3-6-9)
- Les conditions de renouvellement et de résiliation
- Les obligations liées au local (travaux à prévoir ? charges ? normes ?)
Un loyer trop élevé peut anéantir une rentabilité saine sur le papier. Faites vos calculs.
Les actifs matériels et immatériels
Étudiez l’état du matériel (cuisine, caisse, mobilier…). Doivent-ils être remplacés à court terme ? Le local est-il aux normes ? Disposez-vous de licences ou autorisations difficiles à obtenir (ex : licence IV, autorisation d’ouvrir le dimanche) ?
Un simple four vieillissant peut représenter 10 000 € de dépense imprévue. Mieux vaut tout savoir à l’avance.
Le potentiel de développement
Acheter un commerce ne signifie pas le figer tel quel. Demandez-vous :
- Quels leviers de développement pourraient être activés ?
- Peut-on développer une offre digitale ? Une stratégie de livraison ?
- Une rénovation ou une nouvelle gamme pourrait-elle booster l’activité ?
Un bon fonds de commerce, ce n’est pas seulement ce qu’il fait… c’est surtout ce qu’il pourrait faire entre vos mains.
Les étapes concrètes pour acheter un fonds de commerce en toute sécurité
Vous avez un coup de cœur et les chiffres sont bons ? Parfait. Mais gardez la tête froide. Voici les étapes incontournables :
Audit et lettre d’intention
Avant de signer quoi que ce soit, missionnez un expert-comptable (ou faites-le vous-même si vous êtes aguerri) pour auditer les comptes. Rédigez ensuite une lettre d’intention qui résume les contours du projet. Elle n’est pas juridiquement engageante mais structure les négociations.
Négociation et offre de reprise
C’est ici que vous entrez dans le vif du sujet. Incluez :
- Le prix proposé
- Le périmètre exact (fonds de commerce seul ? stock ? murs ?)
- Les conditions suspensives (obtention de prêt, autorisation administrative…)
Gardez une marge de négociation. Et surtout, restez prudent si votre cible refuse toute transparence (chiffres non fournis, bail flou…).
Signature de l’acte de cession
Une fois tous les points validés, vous entrez dans la phase de contractualisation :
- Préparez l’acte de cession avec un avocat ou notaire
- Pensez à la promesse de vente, souvent préalable à l’acte définitif
- Respectez les formalités (publicité, déclaration à l’administration, etc.)
La cession d’un fonds de commerce est une opération réglementée. Un oubli peut retarder l’opération, voire la compromettre.
Et après l’achat ? Ce que les entrepreneurs oublient trop souvent
L’achat, ce n’est que le début de l’aventure. Beaucoup de repreneurs sous-estiment la période de transition. Prévoyez un accompagnement du cédant si possible (surtout pour les affaires de bouche ou relationnelles).
Ensuite, mettez votre patte progressivement. Ne bousculez pas tout en une semaine (“On change les couleurs, on vire le logo, et tout le monde porte des t-shirts !”). Respectez les habitudes de la clientèle, puis introduisez les nouveautés.
Enfin, structurez rapidement vos indicateurs de performance : tickets moyens, taux de récurrence, avis clients, chiffre d’affaires par gamme. Pilotez dès le départ.
La reprise d’un fonds de commerce, c’est finalement un subtil mélange entre mémoire et renouveau. Vous n’achetez pas juste un droit d’exploiter un local. Vous achetez une histoire… à vous de l’écrire à votre façon.